Jubilésdesaint Hubert 2025  2027Grandes Festivités !

Image d'un pélerin et du cerf de saint Hubert

Appel aux artistes et aux élèves

Notre association invite tous les citoyens, et plus spécialement les artistes : écrivains, peintres, sculpteurs, musiciens qui seraient stimulés par notre thème : « En résonance avec saint Hubert, oser changer de voie ? », à réaliser une œuvre qui en illustrerait l’une ou l’autre facette. Ces œuvres seront exposées dans la Basilique ou dans le palais abbatial en 2027.

Nous invitons aussi les professeurs de français des classes terminales des écoles de Saint-Hubert et plus largement des provinces de Luxembourg et de Liège à organiser des concours de dissertation sur notre thème.

« En résonance avec saint Hubert, oser changer de voie ? » : voilà le thème commun qui reliera toutes les festivités, la source de réflexion et d’inspiration, et le fil conducteur qui reliera passé, présent et futur de la Ville. Le point d’interrogation a son importance. Il ne s’agit pas d’un mot d’ordre. L’idée est simplement que la vie et la légende de saint Hubert méritent encore, et peut-être plus que jamais, de nous faire réfléchir.

Pour entamer cette réflexion, mesurons d’abord la profondeur du terme de résonance que nous avons choisi de mettre en avant. Une expérience toute simple et si souvent faite par les habitants et les visiteurs de Saint-Hubert nous y introduit : comment ne pas se laisser émouvoir par la rencontre avec un cerf, par la fureur de son brâme ou par le timbre d’une trompe de chasse qui résonne dans un bois, dans les travées de la Basilique ou sur son parvis ? Cette émotion, si elle n’est pas seulement superficielle, nous met sur la piste de ce que la notion de résonance permet de penser avec le sociologue allemand, Hartmut Rosa qui en a proposé une puissante théorie1. Celle-ci consiste à voir dans l’idée de résonance une forme de relation à notre environnement dont nous faisons tous l’expérience quand nous sommes positivement affectés, touchés, émus, saisis par ce qui nous arrive, par exemple à la faveur d’une rencontre avec une personne, une œuvre d’art, un paysage, une idée, …, en dehors de tout rapport de domination ou de type utilitaire, et aussi quand nous sommes nous-mêmes personnellement capables d’atteindre, d’émouvoir, de toucher quelque chose ou quelqu’un et faire entendre notre propre voix. La notion de résonance ainsi comprise présuppose donc d’abord la conjonction de deux éléments : le fait d’être affecté et la capacité de faire entendre sa propre voix ; « écouter et répondre ; quelque chose m’atteint et m’appelle, et je constate soudain qu’une connexion se crée du fait que je suis en mesure de réagir à ce que je reçois »2.

Deux autres facteurs déterminants concourent encore à définir la résonance telle que Hartmut Rosa l’entend : la transformation à laquelle elle conduit et le fait que l’on ne peut ni prévoir, ni prédire, ni forcer la réalisation de cette expérience. « Là où la résonance se produit, là où je m’arrête réellement et me relie à ce qui m’atteint, je me transforme, j’entre dans une autre disposition d’esprit et je rencontre d’autres pensées. Je commence à voir le monde autrement ou à penser différemment ». Mais « la clé de cette expérience est que je ne peux pas la forcer » ni la prévoir. La relation de résonance « n’est pas à notre disposition : on ne peut ni la fabriquer, ni l’acheter, ni la forcer »3.

La proposition essentielle de Hartmut Rosa, c’est qu’une vie bonne est faite de relations résonnantes. Cette proposition n’a rien d’évident car elle revient à contester radicalement des tendances lourdes qui sont à l’œuvre dans nos sociétés occidentales actuelles. Ainsi quand nous sommes obsédés par la volonté d’accumuler toujours plus de biens de consommation, quand notre rapport à la nature réduit celle-ci à une simple ressource, ou quand nous ne concevons notre idéal d’autonomie personnelle que comme un moyen de maîtriser les choses et d’en disposer, nous vivons aux antipodes de l’idéal d’une vie réussie portée par des axes de résonance.

Nos expériences les plus fortes de bonheur, nous dit Hartmut Rosa, se produisent « quand quelque chose nous bouleverse – une idée, une musique, une personne dont nous tombons amoureux ou une rencontre avec la nature par exemple. De telles rencontres nous conduisent en général à renverser nos projets, nous avons alors le sentiment de devoir changer quelque chose, une métamorphose s’opère en nous suivant une direction que nous ne pouvons ni prédire ni contrôler »4. La théorie de la résonance accorde à ces expériences la plus haute considération.

Si le meilleur des religions fournit un espace social et matériel propice à de telles relations de résonance, il est beaucoup d’autres expériences non religieuses qui y sont favorables aussi. En mettant en avant la notion de résonance et en la comprenant avec cette profondeur, nous ne voulons absolument pas imposer l’interprétation religieuse de la légende de saint Hubert, mais nous ne voulons pas non plus l’exclure. Elle a sa place à côté d’autres lectures parfaitement laïques. C’est la raison pour laquelle notre projet est résolument pluraliste.

Le fait que l’on ait imaginé, selon la légende elle-même empruntée au XVème siècle à celle de saint Eustache, la rencontre d’un grand seigneur du huitième siècle avec un cerf majestueux où il croit pouvoir discerner la croix de Jésus Christ peut encore nous émouvoir et résonner en nous parce que dans cette rencontre imaginaire, Hubert est touché au plus profond de lui-même, en dehors de tout rapport de domination ou de type instrumental -il renonce à tuer le cerf- et il réagit en décidant de changer de voie, d’abandonner la vie luxueuse, fastueuse et matérialiste qui était présumée la sienne avant cette rencontre, pour se tourner vers une vie plus sobre, plus altruiste et plus ouverte aux ressources de la spiritualité.

Notre projet consiste à inviter celles et ceux qui participeront aux festivités en l’honneur de ce triple jubilé à se laisser émouvoir par cette vie et cette légende parce qu’il y va d’une puissante expérience de résonance qui peut elle-même résonner en nous. Dans le prolongement de la légende décodée de cette façon, nous proposerons de chercher dans le passé et le présent les autres expériences, religieuses et non religieuses, de conversion radicale suscitées par des relations de résonance.

Le terme de résonance que nous retenons dans notre narratif -nous ne disons pas « avec saint Hubert », mais « en résonance » avec lui- invite à prendre conscience de ce qui nous tient à la fois éloigné et relié à la vie et à la légende du saint. En articulant la distance avec la proximité, il invite à la curiosité. La vie et la légende de saint Hubert remontent à un passé lointain, mais elles peuvent encore résonner aux oreilles de nos contemporains, qu’ils soient croyants ou non, si l’on mesure bien à la fois la radicalité du changement de voie qui a été imputé à saint Hubert à son époque et la radicalité du changement de voie auquel notre société devrait se résoudre pour relever tous les grands défis auxquels elle fait face.

Le premier artiste qui nous a rejoint est José Léonard. C’est à lui que nous devons notre logo et l'illustration de notre thème. Nous lui adressons nos remerciements les plus chaleureux. C’est aussi lui qui a dessiné des roses à la façon de Pierre-Joseph Redouté, l’illustre peintre des roses natif de Saint-Hubert. Ses dessins seront affichés dans les commerces de la ville dès 2025.

1 Cfr Hartmut ROSA, Résonance. Une sociologie de la relation au monde (trad. fr.), Paris, La Découverte, 2018.

2 Hartmut ROSA, Pourquoi la démocratie a besoin de la religion (trad. fr.), Paris, La Découverte, 2023, p. 59.

3 Ibidem, p. 62-64.

4 Hartmut ROSA, Résonance. Une sociologie de la relation au monde, op. cit., p. 523.